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Il y a 20 ans, Tchèques et Slovaques se séparaient à l’amiable

04/02/2013
Pendant que la dernière guerre européenne d’un 20ème siècle sur le déclin faisait rage dans les Balkans, et après que la Croatie, la Slovénie et la Bosnie Herzégovine eurent décidé de leur avenir en se proclamant nations indépendantes de cette fédération Yougoslave montée à la hâte suite au Traité de Versailles de 1918, un peu plus au nord, au cœur de ce qui était trois ans plus tôt encore le « Bloc de l’Est », le 1er janvier 1993, Tchèques et Slovaques décidaient d’un commun accord de ne plus faire route ensemble. Et c’est sous la haute autorité du Président Vaclav Havel que cette scission trouva son épilogue tout en douceur, ce qui, sur le papier, n’était pas gagné d’avance.

 

 

De Venceslas à l’Union Européenne…

A l’époque communiste, en plus de la RFA et de l’Autriche, la Tchécoslovaquie avait frontières communes avec la RDA, la Hongrie, la Pologne (la plus grande) et l’Union Soviétique (la plus petite). On ne pouvait se trouver plus « intégré » au Bloc de l’Est, une situation géographique qui explique en partie l’asservissement auquel le peuple de ce pays aura été soumis durant l’expérience totalitaire qui durera de 1948 à 1989. Les successeurs des souverains Venceslas et autres Habsbourg n’avaient guère l’habitude, eux aussi, de partager le pouvoir.

Après le règne des Habsbourg et le démantèlement de l’empire austro-hongrois à la fin de la Guerre de 14-18, naîtront de nouvelles républiques. Ainsi, la République Tchécoslovaque Indépendante verra le jour le 28 octobre 1918. 

La forte germanisation d’une partie du territoire justifiera par la suite les velléités d’Adolf Hitler toujours à la recherche d’espaces supplémentaires pour son expansion hégémonique.  Le 15 mars 1939, la partie tchèque sera occupée par les nazis et deviendra le Protectorat de Bohême-Moravie, alors que la partie slovaque se déclarera autonome. Les mêmes causes auront les mêmes effets au sortir de la guerre, le « Coup de Prague » de 1948 scellera le sort de cette nation qui va se retrouver enfermée durant quarante et un ans derrière le Rideau de Fer. 

Décidément, la Tchécoslovaquie avait rendez-vous avec les années en « 8 » : 1918 république proclamée, 1938 accords de Munich qui décideront de son occupation, 1948 « Coup de Prague », et 1968 ce « Printemps de Prague » qui suscita beaucoup d’espoirs… en vain. On se souvient que la réponse de Moscou à cette demande de liberté fut sanglante !

Mais cette République Socialiste Tchécoslovaque, regroupant alors dix régions (cinq en Bohême, deux en Moravie et trois en Slovaquie) tombera avec les autres dominos du Bloc après la chute du Mur de Berlin en novembre 1989.

 

 

 

Avec Vaclav Havel

A Prague, on parlera de « Révolution de Velours » car il n’y eut que très peu de victimes tout au long de ces semaines de bouleversements politiques (et militaires), et c’est un homme de lettres et de théâtre, Vaclav Havel, militant anti-communiste souvent emprisonné, qui deviendra le premier Président de cette nouvelle République de Tchécoslovaquie.

Mais les vieilles querelles ressortiront bien vite des cartons où furent rangés ces vieux traités que l’on croyait à usage pérenne, les Slovaques – dont beaucoup ont des origines magyars - n’acceptant plus la domination de Prague et des Tchèques, par ailleurs deux fois plus nombreux. Sans l’intelligence de Vaclav Havel, tout ceci aurait pu se terminer « à la yougoslave » dans un bain de sang. 

Fort heureusement, le 1er janvier 1993, il y a déjà vingt ans, la scission de la Tchécoslovaquie était officialisée par le pouvoir de Prague, celle-ci aboutissait à la naissance de la République Tchèque (ex-Bohême-Moravie) et de la Slovaquie. 

Les deux grands fleuves qui irriguent les terres des Venceslas avaient désormais chacun leur capitale, Prague pour la Moldau, et Bratislava pour le Danube. On ne pouvait même plus évoquer une quelconque histoire à la Kafka, l’enfant du pays.

 

 

Parmi les 27

Aujourd’hui, ces deux républiques font partie de l’Union Européenne, leur adhésion remonte au 1er mai 2004. Si la Slovaquie a également opté pour l’euro, la République Tchèque est restée fidèle à sa couronne.

La République Tchèque, qui vient d’élire son troisième Président, Milos Zeman, succédant à Vaclav Havel et Vaclav Klaus (en fonction jusqu’au 8 mars 2013), est forte d’un peu plus de dix millions d’habitants, contre 5,5 millions pour sa voisine slovaque. La France est actuellement son cinquième partenaire économique et la Slovaquie son deuxième, mais c’est bien sûr l’Allemagne qui a raflé la mise dès la Chute du Mur, on se souvient que le constructeur Skoda tomba dans le giron du géant Volkswagen dès 1991. Parmi les nombreux partenariats entre la France et la République Tchèque, citons l’usine PSA/Toyota de Kolin où sont produites les petites 107, C1 et Aygo. Le taux de chômage de la République Tchèque est de 7,4% (chiffres 2011).

De son côté, la Slovaquie, actuellement présidée par le social-démocrate Ivan Gasparovic, a pour 6ème partenaire économique la France, et 80% de ses échanges se font avec l’Union Européenne. Le taux de chômage y est de 13,5% (chiffres 2011), et ici aussi on trouve le constructeur français PSA qui fabrique sur place ses 208 et C3 Picasso.

Enfin, juste pour l’histoire, on rappellera que notre Napoléon national est bien sûr passé dans la région, il en a même rapporté l’une de ses plus belles victoires en décembre 1805, à Austerlitz, aujourd’hui Slavkov, petite bourgade de Moravie du sud entre Prague et Brno. Mais c’est une autre histoire…

 

Jean-Yves Curtaud

 

Photos : le château de Bratislava, le plus vieux pont de Bohême et une affiche Skoda en 1990 à Prague lors du 1er salon automobile. (photos Le Chroniqueur)

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