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Le Mystère de Vienne

15/03/2010
La particularité exceptionnelle du patrimoine de Vienne repose non seulement sur un patrimoine apparent et enfoui que les services du patrimoine traitent remarquablement, mais sur un patrimoine perceptible dans les sous-sols et qui se prolonge par des élévations allant de 10 à 15 m de haut. Cette richesse d’information illustrant la verticalité de l’histoire de la ville doit avant tout être protégée. Il y a une vraie urgence.

Il faut  changer  l’approche que chacun peut avoir des sous-sols de la ville de Vienne, car ils constituent, indépendamment des recherches historiques, un véritable atout pour la Vienne moderne.
Dans son discours de 48, l’empereur Claude qualifie Vienne d’« ornatissima et de valentissima », et le poète Martial de « pulchra ». Encore, à la fin du 8e siècle, l’évêque d’Orléans Théodore est subjugué par la qualité des monuments de Vienne avec leur grand appareil.
Le patrimoine visuel est déjà conséquent : temple d’Auguste, « arcades du Forum », très grand théâtre, odéon, auditorium grec à ciel ouvert, édifice « pseudo-cybèle » en partie basse, un temple nymphée, grand sanctuaire de Pipet, grand sanctuaire au pied de Sainte Blandine, sanctuaire sur le Mont Arnaud, le complexe du palais du Miroir au débouché du grand pont augustéen refait perpétuellement à l’identique, « la pyramide du cirque », mais aussi Saint-Maurice, Saint-Pierre, Saint-André le Bas et Saint-André le Haut

De Métaponte au groupe épiscopal…
La découverte d’une monnaie d’argent de Métaponte, ville d’Italie du Sud ou Grande Grèce du 4e siècle, trouvée au pied de la colline Sainte-Blandine, atteste d’un don fait par un commerçant à un sanctuaire antérieur à la venue des Allobroges au 3e siècle avant notre ère. Cette découverte unique renforce l’ancienneté du lieu et préfigure le potentiel archéologique à découvrir
Après avoir établi la partie graphique de la carte archéologique, c’est en descendant dans les caves pour caler certains plans que nous avons découvert un monde étonnant… Les fondations du premier établissement colonial de 46 avant notre ère, sous la conduite probable de Tiberius Nero, père du futur empereur Tibère, les infrastructures d’un second forum de grande dimension. Une nouvelle area sacra autour du temple d’Auguste. Les vestiges d’un portique d’une grande area sacra liée aux arcades dite du forum. Un réseau  d’aqueduc augustéen. La porte du pont au Haut Empire et la porte du Bas Empire, construite à côté de la porte du pont.
La porte du Bas Empire du côté de la Gère.
Le palais sur socle du Consulares de la Viennensis qui sera transformé en Palais épiscopal (une tour d’épaulement est conservée à 14 m de haut).
Un très grand palais entouré de piliers à arcades qualifié par la mémoire collective de «Palais du Prétoire», et ensuite des « rois de Bourgogne ». Les fondations voûtées d’un immeuble à étages ayant servi de logement aux fonctionnaires de l’administration du Bas Empire, puis au personnel épiscopal. De très grands entrepôts dans le secteur de saint-André le Bas avec des séquences en élévation.
Le premier groupe épiscopal installé dans les jardins du palais du Consulares, avec une cathédrale double comme à Genève. L’une d’elle sera refaite au 5e siècle, avec des fondations de 2,40 m supportant des arcatures.

Evêque et pape
Vers 510, Avit, évêque de Vienne, petit-fils de l’empereur Avitus, décrit le projet d’un grand baptistère dont on a trouvé à son emplacement supposé, les vestiges de murs circulaires de 2,40 mètres et appartenant après maintes vérifications, à un diamètre de 30 mètres. Le but inavoué de ce programme unique en Gaule était la conversion au catholicisme des Burgondes.
La future reine des Francs, la burgonde Clotilde, protégée à Vienne par Avit, apportera à son futur mari, Clovis, toutes les clefs de la politique internationale
Les 8e et 9e siècles sont largement représentés le long de la rue des Clercs où l’on perçoit des suites de bâtiments importants appartenant à des Aulae palatiales. On songe à la résidence du Roi Boson et de Louis III l‘Aveugle.
Le  Groupe épiscopal est démonté après 1030 pour recevoir un nouveau palais épiscopal constitué de murs de 1,80 mètre de haut.  Restauré au 13e siècle, Il subsiste quelques séquences conservées à 12 mètres de haut sur lesquelles a été découverte une remarquable fresque appartenant à la salle des Clémentines qui sera une des salles où s’est déroulé le célèbre procès des Templiers en 1311, lors du Concile de Vienne sous l’autorité du pape Clément V, et qui aboutira au printemps 1312, en présence du roi Philippe le Bel, à la dissolution de l’Ordre des Templiers.
C’est cette histoire qui se trouve aujourd’hui dans les rues, en élévation et dans le sous-sol.

Les enjeux
L’enjeu du patrimoine aujourd’hui est de présenter la « verticalité de l’histoire urbaine » que l’on retrouve avec une intensité rare dans la partie intra-muros de la ville de Vienne.
Aux côtés des splendides monuments en élévation, Vienne possède un sous-sol d’une richesse archéologique rare - voire unique ! -, et ce patrimoine doit être préservé, d’abord pour éviter l’irréparable, et ensuite faire l’objet d’une présentation publique.  On n’insistera jamais assez sur le fait incontestable que nous avons sous nos yeux, et sous nos pieds, des vestiges considérables que beaucoup de villes pourraient nous envier. Ce miracle repose sur le fait que tous les programmes ont été importants et se sont traduits par des épaisseurs de murs considérables.
Si Arles a 100 édifices classés, Vienne a les mêmes potentialités ; ce retard lui est préjudiciable culturellement et économiquement.
Elle peut prétendre immédiatement au classement du Patrimoine Européen.  Par ailleurs le projet d’une grande crypte archéologique présentant ses richesses en sous-sol, accompagné de fouilles programmées, serait le projet qu’attend le 21e siècle : son résultat serait sans nul doute la voie royale pour que Vienne soit inscrite un jour, au patrimoine Mondial de l’UNESCO, même si chacun connaît la difficulté d’une telle démarche.
De l’époque gauloise en passant par le Haut Empire puis par le Bas Empire, la ville a toujours été une capitale ; les  époques burgonde, carolingienne et celle des rois de Bourgogne,  tendent à prouver que Vienne a été aussi une « ville royale » qui a souvent occupée une place stratégique dans tout au long de son histoire.

Le Mystère…
Après avoir succinctement survolé quinze siècles d’histoire et d’urbanisme, il faut essayer de décrypter ce « miracle culturel viennois » qui constitue le « mystère de Vienne ».
Avant, il importe de préserver les vestiges dans les caves avec, pourquoi pas, une charte de conservation et d’aménagement passée entre les propriétaires et la ville.
Il est impératif d’établir un inventaire afin de connaître les potentiels d’un secteur défini…
Enfin, en 2011, dans le cadre du 700e anniversaire du Concile de Vienne et de la fin des Templiers, présenter la salle des Clémentines et sa fresque…  ce lieu ferait venir un grand nombre de visiteurs du monde entier.
Rappelons que Vienne abrite la plus fabuleuse collection de lapidaires de France, et est riche d’un sous-sol témoignant des différentes périodes de son histoire…
Vienne mérite un vrai débat… c’est l’affaire de tous pour que Vienne demeure cette « émotion ».

 

 

 

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